vendredi 10 novembre 2017

Un bel article sur la synesthésie

Entretien avec Daniel Tammet : 
De la synesthésie à la poésie

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Diagnostiqué autiste Asperger, l’écrivain britannique Daniel Tammet 
est synesthète : pour lui, comme dans les poèmes de Baudelaire, les sons, 
les mots, les couleurs 
et les chiffres se répondent. 
Il nous explique sa fascination pour les mathématiques 
et la littérature. 


Pi a changé votre vie : vous êtes devenu célèbre en 
en récitant 22 514 décimales pendant cinq heures 
et neuf minutes. Pour quelles raisons éprouvez-vous une telle fascination pour ce nombre, que 
vous comparez à Mona Lisa ou encore 
à une symphonie de Mozart ?


Pour moi, Pi est un poème numérique gigantesque, qui parle de tout, par définition, puisqu’il est infini. Quand j’y perçois ces couleurs, ces émotions, ces textures, j’y perçois également comme un sens, une histoire qui se dégage, en tout cas que je construis le long de ces chiffres. J’avais envie de raconter, de réciter ce poème devant un public absolument pas matheux ni synesthète* : des femmes de ménage, des ouvriers, des adolescents, il y avait de tout à Oxford, dans cette salle du musée des mathématiques. 

Outre l’expérience elle-même, pleine de concentration et de méditation, ce qui m’a touché profondément, c’est ce partage. Ceux qui m’écoutaient suivaient de très près ce poème, l’écoutaient avec beaucoup d’attention, étaient touchés eux-mêmes en écoutant des rythmes, des motifs d’intensité, d’intimité. Certains avaient les larmes aux yeux. Une complicité s’installait entre nous. Dès lors, je me suis dit que si j’avais un don, le principal était là : non pas compter, mais raconter. Écrire était ma vocation.


Lorsque vous parcourez par la pensée ce nombre infini, les mêmes sensations reviennent-elles toujours au même endroit ?

J’ai appris les 22 514 premières décimales intuitivement. Parfois c’était très rapide, un rythme se dégageant tout de suite. À d’autres instants, c’était plus difficile, il fallait creuser pour trouver quelque chose auquel m’accrocher. Au fil de mes trois mois d’entraînement, certaines couleurs, certaines combinaisons étaient plus importantes et plus pertinentes que d’autres. Mais c’est comme un poème : en le relisant, on peut toujours trouver des choses passées inaperçues lors des premières lectures. Si j’avais à cœur de refaire l’expérience, ce serait sans doute différent, puisque le public le serait, et que je découvrirais des aspects inédits dans ces chiffres.


Les nombres premiers (divisibles seulement par eux-mêmes, n.d.l.r.) vous passionnent autant que Pi. 
Que présentent-ils de particulier pour vous ?


Ils sont à la base de notre système mathématique. On connaît aujourd’hui beaucoup de choses sur eux, mais leur comportement conserve une part de mystère qui ne sera peut-être jamais résolu. On sait qu’il y a 25 nombres premiers dans les 100 premiers nombres, 166 dans les 1000 premiers, 1 250 dans les 10 000 premiers, et ainsi de suite. Leur quantité diminue, mais leur surgissement de nulle part reste imprévisible. Encore une fois, c’est un peu comme un poème, avec un mélange de rythmes, de règles, et puis de chutes, de combinaisons surprenantes.


Vous êtes devenu écrivain, mais avez-vous eu envie d’être mathématicien ?


Non, à aucun moment. J’ai de la difficulté avec bien des aspects des mathématiques comme l’abstraction, l’algèbre, pour lesquelles je n’ai pas beaucoup d’affection. En mathématiques, on part de choses concrètes pour aller vers l’abstraction. Or l’abstraction est l’ennemie de l’écriture : dans un texte, de fiction ou non, on perd des lecteurs en s’éloignant du tangible. Écrire, c’est donner des odeurs, des couleurs, des sentiments, avec le langage le plus imagé, le plus incarné possible. Je trouve intéressant ces allers-retours entre le réel et l’abstrait, mais mon chemin à moi va toujours dans le sens inverse des mathématiciens.




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